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Expertise judiciaire – Dites Maître, ça se passe comment une expertise ?

Expertise judiciaire – Dites Maître, ça se passe comment une expertise ?

Agathe MONCHAUX-FIORAMONTI - ACTUALITÉS

En droit immobilier comme en droit des assurances, de nombreux dossiers donneront lieu à une expertise judiciaire qui aura pour but de déterminer les causes techniques du litige et une évaluation d’au moins une partie du préjudice.
 
Il s’agit d’une phase du dossier dont les mécanismes et l’objectif sont parfois difficile à comprendre pour le client tant la technique et le juridique se mêle.
 
Une expertise judiciaire, qu’est-ce c'est ?
 
L’Avocat et le Juge sont avant tout des juristes et non des techniciens d’un domaine donné.
 
Ils ne pourront que présumer et le Juge doutera alors, justement, de la pertinence de l’analyse de l’Avocat.
 
Dans tous les litiges qui portent sur un domaine technique (construction, automobile, dommage corporel etc.), il est préférable de se fonder sur l’avis d’un technicien, expert dans le domaine concerné, qui pourra éclairer le juge et les parties sur les causes techniques du litige.
 
Mais l’avis technique d’un expert choisi par la partie demanderesse pourra être contesté par la partie adverse : partialité du technicien, avis technique contraire etc.
 
L’expertise judiciaire a donc pour objet de faire intervenir un technicien nommé par le juge (et donc impartial) et dont les constatations et raisonnement seront fait au contradictoire de toutes les parties de sorte que tous le monde pourra exposer ses hypothèses et l’expert les approuvera ou les réfutera en motivant son avis.
 
Ainsi, le juge, lorsqu’il devra trancher, disposera d’un avis technique fiable et contradictoire donc difficilement contestable.
 
Comment fait-on nommer un Expert Judiciaire ?
 
Le juge doit être saisi.
Avant même que tout litige soit engagé, le juge des référés peut être saisi pour qu’il désigne un Expert Judiciaire (article 145 du Code de procédure civile).
En cours de litige si l’évolution de celui-ci le justifie, toute partie pourra solliciter la nomination d’un expert judiciaire pour clarifier une question technique qui pouvait apparaitre évidente au début et s’avère plus difficile à trancher qu’il n’y parait (article 144 du Code de procédure civile).
 
Une expertise judiciaire c’est gratuit ?
 
Non, l’Expert Judiciaire n’intervient pas bénévolement, il se fait rémunérer par des honoraires qui lui sont versés en fin de dossier lorsqu’il a justifié des diligences effectuées et de leur quantité.
Toutefois, une provision (une avance) à valoir sur ses honoraires doit d’abord être versée, le plus souvent par la partie qui sollicite la nomination de l’Expert.
Cette provision est versée au Tribunal (c’est la consignation) et ce versement doit intervenir dans un délai rapide fixé par le Tribunal (souvent entre 4 et 6 semaines à Versailles) sinon la nomination de l’Expert est caduque.
 
Quel est son coût ?
 
A Versailles, la première consignation est le plus souvent entre 1 500,00 et 3 000,00 € selon la matière considérée.
Cependant, dans certains dossiers et notamment en matière de construction le montant peut être d’emblée plus important (5 000,00 €) et/ou des consignations complémentaires pourront avoir lieu en cours d’expertise si l’Expert constate que ses diligences vont dépasser le montant déjà consigné.
En fin d’expertise, un complément pourra être sollicité si la facture de l’Expert est plus importante que la consignation mais de l’argent pourra également être rendu si ces diligences ont été moindre.
 
Les frais d’expertise font partie de ce qu’on appelle les « dépens ». Ainsi, en fin de procédure, ils seront mis à la charge de la partie perdante qui devra les rembourser à la partie qui en a fait l’avance.
 
Une fois que l’Expert est nommé, comment cela se passe-t-il ?
 
Une fois que l’Expert Judiciaire est nommé, qu’il a accepté sa mission et que la consignation a été faites, il convoque toutes les parties à une réunion d’expertise.
 
Au préalable, les parties lui ont envoyé leurs pièces et leurs écritures afin qu’il connaisse le dossier.
 
Cette première réunion d’expertise se déroulera sur les lieux du litige ou à l’endroit où les constatations pourront être faites (cabinet de l’expert-médecin pour une expertise médicale, garage pour une expertise automobile, lieu de la construction etc.).
 
Toutes les parties sont convoquées et doivent être présentes ou représentées. Elles ont le droit d’être assistées ou représentées par leur Avocat et leurs conseils techniques si elles en ont (attention, cela peut parfois faire beaucoup de monde chez vous si plusieurs intervenants sont mis en cause). Si une des parties n’est ni présente, ni représentée, l’expertise se tient quand même et cela ne remet pas en cause le caractère contradictoire.
 
L’Expert Judiciaire commence par rappeler la mission qui lui a été donné par le Tribunal. Il est en effet limité par cette mission et ne peut aborder ou répondre à des questions qui ne font pas partie de cette mission.
 
Il demande ensuite à chaque partie d’exposer ses arguments, son histoire.
 
Il fait ensuite ses constatations techniques qui dépendront donc du domaine de l’expertise envisagée.
 
Toutes les parties peuvent à ce stade poser des questions, faire des observations etc.
 
Une fois cette étape terminée, l’Expert clôt la réunion, souvent en faisant état du calendrier prévisionnel des suites des opérations, parfois en sollicitant des pièces complémentaires (devis, facture, plans etc.) des parties.
 
Dans beaucoup de cas, une seule réunion suffira. Parfois (souvent en matière immobilière et construction), d’autres réunions seront nécessaires pour faire des investigations supplémentaires (souvent avec du matériel spécifique).
 
Après la réunion (ou entre les réunions), l’expert adresses des « Notes aux parties » qui font état des ses investigations, de ses premières conclusions, de ses demandes de pièces etc.
 
Les parties lui écrivent au moyen de « dires » qui doivent obligatoirement être adressés en copie à l’ensemble des parties afin de respecter le principe du contradictoire.
 
Une fois qu’il estime ses investigations terminées et qu’il pense pouvoir rendre ses conclusions au Tribunal, l’expert adresse à toutes les parties un « pré-rapport » et leur laisse un délai pour formuler leurs ultimes observations.
 
Il dépose ensuite son rapport définitif au Tribunal et l’adresse à toutes les parties : l’Expertise Judiciaire est terminée.
 
Et après ?
 
En fonction des conclusions de l’Expert Judiciaire, un accord amiable interviendra ou la partie qui y a intérêt saisira de nouveau le Tribunal pour voir son affaire tranchée à l’aide du rapport d’expertise.
 
Combien de temps dure une expertise judiciaire ?
 
Cela dépend du dossier, de l’expert, des parties…
 
Certaines expertises iront très vite car le dossier n’est pas très compliqué, qu’une seule réunion suffit et que l’expert n’a pas besoin de beaucoup de documents complémentaires.
 
Il arrivera aussi que plusieurs réunions soient nécessaires, que des documents soient demandés qui peuvent mettre du temps à être établis (devis etc.).
 
Il faut donc compter un minimum de 4 mois pour une expertise simple jusqu’à parfois plus d’un an pour des cas plus compliqué.
 
Quel est le rôle de l’Avocat ?
 
Nous ne sommes pas techniciens, notre rôle peut donc parfois paraitre limité. Il est cependant très important car nous sommes là pour poser à l’Expert Judiciaire les questions qui nous permettront de transformer son avis technique en argument juridique.
 
L’Expert Judiciaire ne dit pas le droit, ne tranche pas les responsabilités (c’est le rôle du Juge). L’Avocat est donc là pour s’assurer que l’Expert Judiciaire donne les informations techniques qui seront utiles à son argumentation juridique.
 
Il s’assure également que l’expertise judiciaire se déroule conformément aux règles de droit.
 
Enfin, l’Avocat est là pour s’assurer que l’expertise avance en relançant l’expert quand le dossier stagne, en sollicitant de nouvelle réunion au besoin etc.
 
Et vos honoraires ?
 
L’assistance à expertise judiciaire est l’un des domaines ou le forfait est difficile à envisager en raison de l’imprévisibilité de la durée des opérations d’expertise. Un dossier qui s’avère simple à l’origine peut s’avérer bien plus long et complexe que prévu à l’issue de la première réunion et inversement.
 
Le cabinet pratique donc la facturation au temps passé (nous vous renvoyons vers la partie facturation du site).